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La structuration juridique et financière de Grands Projets d’Infrastructures de TransportsPar Ramin Hariri, Aout 2023
Introduction
L’importance du rôle de l’avocat dans l’accompagnement du financement de grands projets d’infrastructures de transports, tels que les oléoducs, gazoducs et les chemins de fer destinés au transport de produits pétroliers, gaziers et miniers, ne saurait être surestimée.
Les avocats jouent un rôle important en tant que conseillers juridiques spécialisés qui guident les parties prenantes tout au long du processus de financement, de la structuration à la mise en œuvre. Ils apportent une expertise juridique pour résoudre les défis juridiques majeurs qui accompagnent ces projets, ainsi que pour assurer la conformité aux réglementations nationales et internationales.
Dans cet article, nous explorons les défis financiers auxquels sont confrontés ces projets, tout en mettant en lumière le rôle conséquent que les avocats jouent dans la conception de solutions légales novatrices et la création de cadres juridiques solides qui permettent la mobilisation des fonds nécessaires pour réaliser ces projets d’importance stratégique. Ces solutions sont basées sur l’expérience et l’expertise du cabinet RHR LAW, qui est intervenu dans la structuration juridique et financière de ce type de projets.
Parmi les principaux défis financiers à relever, on retrouve en premier lieu les coûts initiaux élevés associés à ces projets d’envergure. La construction et la mise en service des infrastructures de transport nécessitent d’importants investissements en capital. De plus, ces projets sont soumis à des incertitudes liées aux fluctuations des prix des matières premières, des risques géopolitiques, et des délais prolongés pour atteindre la rentabilité.
Pour surmonter ces obstacles financiers, plusieurs méthodes et stratégies sont envisageables. Les États ont souvent recours à des Prêts Bancaires adossés à des garanties souveraines pour sécuriser les investissements nécessaires. Cette approche offre une certaine stabilité aux investisseurs, mais elle impose des obligations significatives aux États, dont certains ont dépassé le plafond d’endettement, ce qui limite leur capacité à fournir des garanties souveraines pour des projets d’infrastructures et qui nécessite des structures financières innovantes et en identifiant des mécanismes juridiques alternatifs. (A)
Les Partenariats Public-Privé (PPP) sont une alternative de plus en plus courante pour mobiliser des capitaux privés et réduire la pression sur les ressources publiques. Les PPP impliquent une collaboration étroite entre le secteur public et privé, partageant ainsi les risques et les avantages. Cependant, leur mise en place requiert une expertise juridique et financière significative. (B)
Les Fonds d’Infrastructure peuvent jouer un rôle clé dans la mobilisation de fonds pour ces projets. Cependant, leur mécanisme et leurs limites doivent être soigneusement évalués pour s’assurer qu’ils correspondent aux besoins spécifiques du projet. (C)
Enfin, l’Émission d’Obligations représente une méthode de financement largement utilisée pour les grands projets d’infrastructures. Cette approche nécessite une structuration minutieuse et une conformité rigoureuse avec les réglementations locales et internationales. Elle offre aux investisseurs la possibilité d’acquérir des titres de créance tout en exposant l’émetteur à des obligations importantes. (D)
À travers des études de cas réussies, il est possible d’illustrer les approches qui ont permis de mobiliser des financements de manière efficace tout en gérant les risques associés à ces projets. Ces exemples concrets mettent en lumière la manière dont les problématiques juridiques peuvent être abordées de manière stratégique pour atteindre les objectifs de financement et de développement.
Les prêts bancaires traditionnels sont l’une des méthodes de financement couramment utilisées pour les projets d’infrastructures, tels que les oléoducs, gazoducs et les chemins de fer destinés au transport de produits gaziers et miniers depuis les champs d’extraction vers les points de livraison.
La dette senior est habituellement octroyée par un éventail étendu d’institutions financières qui participent à un projet donné.[1] Elle se positionne généralement comme la composante prédominante du financement d’un projet et revêt une importance significative. La plupart des projets dans le secteur des infrastructures de transport requièrent une dette senior à long terme, avec des périodes de remboursement s’étalant sur 10 ans ou plus.
En parallèle de la dette senior, la dette subordonnée est également accordée par diverses institutions. Cependant, ce niveau de financement occupe généralement une position subordonnée par rapport aux tranches de la dette senior, en ce qui concerne les flux de trésorerie et certains droits contractuels. En raison de son rang inférieur dans la hiérarchie des créanciers, la dette subordonnée s’accompagne généralement de coûts plus élevés en termes de taux d’intérêt et d’autres dispositions contractuelles.
Cependant, ces prêts bancaires présentent un certain nombre de défis spécifiques pour ce type de financement :
En premier lieu, il est généralement reconnu que ces projets d’infrastructures impliquent souvent des coûts initiaux considérables pour la construction et le développement. Les institutions financières traditionnelles exigent généralement des garanties importantes et variées pour couvrir les prêts, ce qui peut représenter un défi pour les promoteurs de projets, en particulier pour les projets à grande échelle. Les garanties peuvent inclure des actifs tangibles, des réserves de cash, ou des engagements financiers personnels des actionnaires ou des promoteurs des projets.
Par ailleurs, les projets d’infrastructures de transport peuvent être internationaux, ce qui signifie que les flux de revenus, les coûts et les remboursements de prêts peuvent être exposés aux fluctuations des taux de change, notamment dans les Pays qui ne sont pas dans la Zone Franc[2]. Cela peut accroître le risque financier pour les emprunteurs si la monnaie locale se déprécie par rapport à la monnaie dans laquelle le prêt a été contracté.
Les projets d’infrastructures de transport, peuvent avoir des périodes de rentabilité prolongées en raison des investissements initiaux importants et du temps nécessaire pour générer des revenus significatifs. Les prêts bancaires traditionnels ont des échéances relativement courtes, ce qui peut créer une pression pour le remboursement du capital et des intérêts à court terme.
Les projets miniers, pétroliers et gaziers sont particulièrement sensibles aux fluctuations des prix des matières premières. Les institutions financières internationales et même les banques de développement peuvent être réticentes à financer des projets dont la rentabilité est fortement dépendante de la volatilité des prix des matières premières, ce qui peut compliquer l’obtention de prêts.
Les institutions financières exigent généralement une analyse de faisabilité approfondie (au besoin une étude de faisabilité effectuée par un cabinet international réputé) pour s’assurer que le projet est viable et qu’il peut générer suffisamment de revenus pour rembourser le prêt. Pour les grands projets d’infrastructures, cela nécessite une évaluation détaillée des coûts, des revenus prévus, des risques et des retours sur investissement, ce qui peut être complexe et chronophage.
Par ailleurs, les prêts bancaires traditionnels sont soumis à des exigences de conformité réglementaire strictes : les projets d’infrastructures peuvent être soumis à des réglementations nationales et internationales liées à l’environnement, à la sécurité, aux normes de construction, etc. La conformité à ces réglementations peut être un défi et nécessite des ressources considérables tant du côté du préteur que de l’emprunteur.
Les projets miniers, pétroliers et gaziers, en particulier, peuvent être influencés par des facteurs géopolitiques tels que les conflits régionaux, les changements de régimes politiques et les risques de nationalisation.
Les institutions financières peuvent hésiter à financer des projets exposés à ces risques en l’absence de garantie souveraine de l’Etat.
Les garanties souveraines peuvent en effet renforcer la crédibilité d’un projet aux yeux des prêteurs et des investisseurs. Elles montrent l’engagement du gouvernement à soutenir financièrement le projet en cas de difficultés, ce qui peut attirer davantage de financements.
Ces garanties peuvent ainsi réduire le coût du financement en abaissant les taux d’intérêt des prêts. Étant donné que les investisseurs considèrent les prêts garantis par un gouvernement comme moins risqués, les prêteurs peuvent être disposés à offrir des conditions de prêt plus favorables.
Elles peuvent aussi faciliter l’accès aux marchés de capitaux internationaux, permettant ainsi aux investisseurs de mobiliser des fonds à des taux d’intérêt compétitifs et rassurer les investisseurs quant à la stabilité politique du pays hôte du projet, car elles impliquent l’engagement du gouvernement à maintenir un environnement favorable aux affaires.
Toutefois, tous les États n’ont pas la capacité financière nécessaire pour fournir des garanties souveraines couvrant le montant de ces projets. Les garanties peuvent créer un fardeau financier pour le gouvernement, surtout si elles sont déclenchées en raison de problèmes sur le projet.
En outre, l’émission de ces garanties peut affecter la notation de la dette souveraine du pays. Si le montant des garanties est important, cela peut augmenter le risque perçu par les agences de notation et entraîner une révision à la baisse de la notation, ce qui peut rendre le financement du pays plus coûteux.
Par conséquent, les États africains sont souvent réticents à donner des garanties souveraines, sauf si le projet revêt une importance stratégique et nationale particulière.
[1] Parmi lesquelles nous pouvons nommes les Institutions financières de développement (IFD), tels que l’Overseas Private Investment Corporation ou OPIC, l’institution du gouvernement fédéral américain chargée du financement du développement et les IFD européens : Proparco en France, la FMO aux Pays-Bas, la DEG en Allemagne, la CDC au Royaume-Uni, Cofides S.A. en Espagne et les multilatéraux qui sont des institutions financières internationales aux- quelles participent des États, telles que la Banque Mondiale, la Société Financière Internationale (SFI), l’Agence Multilatérale de Garantie des Investissements (MIGA), l’Association Internationale de Développement (IDA), la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement (BERD), la Banque Asiatique de Développement (ADB), la Banque Africaine de Développement (BAD) et la Banque Interaméricaine de Développement (BID).
[2] La Zone franc est un espace économique et monétaire qui réunit deux unions monétaires (rassemblant respectivement 8 et 6 pays africains), l’Union des Comores et la France. Son objectif est de favoriser la stabilité monétaire et financière, condition nécessaire au développement.
A. Les partenariats public-privé (PPP)
Les partenariats public-privé (PPP), sous forme d’accords contractuels, sont des collaborations entre des entités publiques, telles que les gouvernements ou leurs subdivisions, et le secteur privé. Ils visent à élaborer, financer, construire, exploiter ou entretenir des projets d’infrastructures de transports. De plus en plus courants en Afrique, ces partenariats servent à stimuler le développement économique et à répondre aux besoins en infrastructures. Je vais détailler leur fonctionnement dans ces régions.
Dans le cadre des concessions, le secteur privé se voit octroyer le droit d’exploiter un projet ou un service pour une période déterminée, en échange de paiements, généralement des redevances ou des paiements annuels, versés au gouvernement. La propriété reste publique, mais la gestion quotidienne est confiée au secteur privé, qui reçoit une rémunération pour ses services.
Quant aux partenariats de développement, ils supposent une collaboration plus étroite entre le secteur public et le secteur privé pour le développement et la réalisation de projets de transport. Dans ce cadre, les risques et les bénéfices sont répartis de manière plus équilibrée.
Les PPP offrent plusieurs avantages, notamment la mobilisation de capitaux privés pour financer des projets d’infrastructures coûteux, réduisant ainsi la pression sur les ressources publiques limitées. De plus, le secteur privé apporte souvent une expertise technique et une efficacité opérationnelle qui peuvent contribuer à la réussite du projet.
Dans de nombreux PPP, le secteur privé prend en charge une partie des risques associés au projet, comme les coûts de construction excessive ou les retards, allégeant ainsi le fardeau du gouvernement. En outre, les partenaires privés peuvent apporter des idées novatrices pour la conception, la construction et l’exploitation des infrastructures.
Quelques exemples de partenariats publics-privés réussis dans le domaine des infrastructures de transport en Afrique sont :
- L’autoroute Lagos-Ibadan, au Nigeria, est une autoroute de 127 kilomètres de long qui relie les deux plus grandes villes du Nigeria. Elle a été construite par un consortium comprenant le groupe chinois Sinohydro et le groupe nigérian CCECC. L’autoroute a été inaugurée en 2022 et a permis de réduire considérablement le temps de trajet entre les deux villes.
- Le métro de Nairobi, au Kenya, est un système de métro léger qui dessert la capitale du Kenya. Il a été construit par un consortium comprenant le groupe français Alstom et le groupe chinois CRCC. Le métro a été inauguré en 2021 et a permis de réduire la pollution et les accidents de la route dans la ville.
- Le pont de la baie de Durban, en Afrique du Sud, est un pont à haubans de 7,2 kilomètres de long qui relie la ville de Durban au port de Durban. Il a été construit par un consortium comprenant le groupe français Vinci et le groupe sud-africain Murray & Roberts. Le pont a été inauguré en 2010 et a permis de réduire considérablement la congestion du trafic dans la région.
Ces projets ont été couronnés de succès pour plusieurs raisons. Tout d’abord, ils ont été bien conçus et planifiés, avec une attention particulière portée à la coordination entre les parties prenantes. De plus, ils ont bénéficié d’un financement solide, tant de la part du secteur public que du secteur privé. Enfin, ils ont été mis en œuvre de manière efficace et efficiente, avec des délais et des budgets respectés.
Toutefois, les PPP ne sont pas exempts de défis et de limites. La négociation et la gestion des contrats PPP peuvent s’avérer complexes et nécessiter une expertise juridique et financière significative.
De plus, ces partenariats peuvent créer des conflits d’intérêts entre les objectifs commerciaux du secteur privé et les objectifs publics de fournir des services essentiels, d’où la nécessité de gérer ces conflits de manière appropriée. Par ailleurs, les processus de passation de contrats PPP peuvent manquer de transparence, ce qui soulève des préoccupations en matière de corruption, d’où l’importance de la transparence et de la surveillance pour minimiser ce risque.
Enfin, les PPP impliquent souvent d’importants prêts, et la capacité du secteur privé à rembourser la dette peut être affectée par des facteurs économiques imprévisibles.
Peu de projets de PPP sont viables sans une certaine forme d’aide technique ou financière de l’État. Le financement efficace des projets de PPP peut conduire à recourir aux fonds publics pour veiller à ce que l’État assume des risques qu’il est en mesure de mieux gérer que des investisseurs privés, à ce que les consommateurs soient protégés contre des prix inabordables et qu’ils aient accès aux services d’infrastructure dont ils ont besoin en complétant les projets qui sont viables économiquement mais non viables financièrement. [1]
[1] Jeffrey Delmon, « Programmes de Partenariats Public-Privé, Créer un Cadre pour les Investissements du Secteur Privé dans les Infrastructures », Ouvrage Groupe de la Banque Mondiale, Ed. 2014
B. Les fonds d’infrastructures
Un fonds d’infrastructures est un fonds d’investissement qui investit dans des projets d’infrastructures, tels que des routes, des ponts, des aéroports, des ports, des réseaux électriques et des réseaux de télécommunications. Les fonds d’infrastructures peuvent être créés par des gouvernements, des entreprises privées ou des investisseurs institutionnels.
Les fonds d’infrastructures jouent un rôle important dans le développement des infrastructures en Afrique. Ils peuvent fournir un financement important à des projets qui seraient autrement trop coûteux ou trop risqués pour les gouvernements ou les entreprises privées. Les fonds d’infrastructures peuvent également aider à améliorer la gouvernance et la transparence des projets d’infrastructures.
Nous pouvons citer quelques exemples de fonds qui ont récemment financé des projets d’infrastructures de transport en Afrique :
- Le fonds Africa50 est un fonds d’infrastructures créé par la Banque africaine de développement. Il a investi dans un certain nombre de projets d’infrastructures de transport en Afrique, notamment le pont de la baie de Durban en Afrique du Sud, l’autoroute Dakar-Bamako au Sénégal et le port de Tanger Med au Maroc.
- Le fonds Emerging Africa Infrastructure Fund est un fonds d’infrastructures créé par la Banque mondiale. Il a investi dans un certain nombre de projets d’infrastructures de transport en Afrique, notamment l’autoroute Lagos-Ibadan au Nigeria et la ligne ferroviaire Mombasa-Nairobi au Kenya.
- Le fonds IFC InfraVentures est un fonds d’infrastructures créé par la Société financière internationale (IFC), une filiale de la Banque mondiale. Il a investi dans un certain nombre de projets d’infrastructures de transport en Afrique, notamment le système de métro léger de Nairobi au Kenya et le port de Tema au Ghana.
Ces fonds ont contribué à financer des projets d’infrastructures de transport qui ont amélioré la connectivité et la mobilité en Afrique.
Les gestionnaires de fonds d’infrastructure opèrent en levant des capitaux par l’émission de parts du fonds, sollicitant ainsi des investisseurs institutionnels prêts à investir sur le long terme.
Ces gestionnaires identifient scrupuleusement des projets d’infrastructures à fort potentiel de rentabilité. Ces projets englobent la création d’infrastructures nouvelles, la modernisation de structures existantes, ou encore l’acquisition de concessions pour l’exploitation d’infrastructures.
Les fonds d’infrastructure investissent les capitaux récoltés dans les projets sélectionnés. Ils peuvent acquérir des participations dans des sociétés de projet ou allouer des fonds pour le développement et la construction des infrastructures.
Les gestionnaires de fonds assurent la supervision constante de la gestion des actifs d’infrastructure, englobant la maintenance, les réparations, et l’exploitation. Le but premier étant d’optimiser le rendement financier tout en préservant les performances opérationnelles.
Les fonds d’infrastructure génèrent des revenus à partir des projets, provenant par exemple des péages routiers, des tarifs d’utilisation des aéroports, ou encore des recettes issues de la distribution d’énergie. Une partie de ces revenus est reversée aux investisseurs sous forme de dividendes.
Les gestionnaires de fonds cherchent à réaliser des gains en capital en revendant leurs participations dans les projets ou en cédant les actifs d’infrastructure à un tiers. Les rendements obtenus sont ensuite distribués aux investisseurs.
Il est à noter que les fonds d’infrastructure sont généralement des investissements à long terme, ce qui implique que les investisseurs engagent leurs fonds sur une période étendue. Cette caractéristique peut représenter un désavantage pour ceux ayant besoin de liquidités à court terme.
Par ailleurs, les projets d’infrastructures sont soumis à des réglementations strictes, et susceptibles de faire face à des risques imprévisibles, comme les retards de construction ou les problématiques environnementales.
De plus, les fonds d’infrastructure peuvent se concentrer géographiquement ou sectoriellement, limitant ainsi la diversification des investissements.
Néanmoins, il convient de souligner que les actifs d’infrastructure peuvent parfois manquer de liquidité, compliquant ainsi la vente rapide des participations en cas de besoin.
Les rendements des fonds d’infrastructure sont souvent caractérisés par leur stabilité, mais ils peuvent être moins élevés que ceux d’autres investissements plus risqués, ce qui peut ne pas convenir à tous les investisseurs.
Enfin, les gestionnaires de fonds d’infrastructure doivent naviguer avec prudence, car ils peuvent être confrontés à des conflits d’intérêts lorsqu’ils cherchent à maximiser les rendements pour les investisseurs tout en gérant les coûts et les risques.
En dépit de ces contraintes et de ces défis, il est indéniable que les fonds d’infrastructure demeurent un moyen efficace pour mobiliser des capitaux privés au service du développement des infrastructures essentielles. Ils offrent aux investisseurs la possibilité de diversifier leurs portefeuilles, de bénéficier de flux de trésorerie stables à long terme, et de contribuer à l’essor des pays africains.
C. L’émission d’obligations
Une émission d’obligations pour le financement des infrastructures est une vente d’obligations par un gouvernement, une entreprise ou une institution financière pour financer un projet d’infrastructure.
Les obligations sont des titres de dette qui promettent de payer aux investisseurs un certain taux d’intérêt pendant une période donnée, avant de rembourser le montant emprunté à l’échéance.
Les émissions d’obligations pour le financement des infrastructures sont une source importante de financement pour les projets d’infrastructures en Afrique. Elles permettent aux gouvernements et aux entreprises d’accéder aux marchés financiers internationaux, en attirant des investisseurs institutionnels, tels que des fonds de pension, des compagnies d’assurance et des fonds d’investissement.
Parmi quelques exemples récents d’émission réussie d’obligations pour le financement des infrastructures en Afrique, nous pouvons citer :
- En 2022, la Banque africaine de développement (BAD) a émis un eurobond de 1,5 milliard de dollars pour financer des projets d’infrastructures dans toute l’Afrique.
- En 2021, la Société financière internationale (IFC), une filiale de la Banque mondiale, a émis un eurobond de 750 millions de dollars pour financer des projets d’infrastructures dans les pays en développement, dont l’Afrique.
- En 2020, le gouvernement du Nigeria a émis un eurobond de 1,5 milliard de dollars pour financer des projets d’infrastructures, notamment des routes, des ponts et des aéroports.
Ces émissions ont permis de financer des projets d’infrastructures qui ont amélioré la connectivité, la mobilité et l’accès aux services de base en Afrique.
Les émissions d’obligations pour le financement des infrastructures sont un outil important pour le développement des infrastructures en Afrique. Elles permettent aux gouvernements et aux entreprises d’accéder aux marchés financiers internationaux et de financer des projets qui seraient autrement trop coûteux ou trop risqués.
Tout d’abord, les promoteurs du projet déterminent le montant nécessaire en tenant compte des coûts de construction, des frais de développement, et d’autres dépenses associées.
Ensuite, une structure d’émission d’obligations est élaborée, incluant le montant à lever, la maturité des obligations, le taux d’intérêt, et les modalités de remboursement.
Les promoteurs font souvent appel à des conseillers financiers et juridiques spécialisés pour structurer l’émission, se conformer aux réglementations locales et internationales, et évaluer la viabilité du projet.
Ils identifient des investisseurs institutionnels, tels que des fonds de pension, des sociétés d’assurance, et des fonds d’investissement, susceptibles d’acheter les obligations.
Les obligations sont émises sur le marché des capitaux, généralement par l’intermédiaire d’une banque d’investissement ou d’une institution financière. L’émission initiale consiste à vendre les obligations aux investisseurs.
Le prix d’émission correspond au montant que les investisseurs paient pour acheter les obligations, généralement égal à leur valeur nominale.
Un prospectus ou un mémorandum d’offre est préparé avec le support d’un avocat pour fournir aux investisseurs des informations détaillées sur le projet, les modalités de l’obligation, les risques associés, et d’autres informations pertinentes.
Les obligations peuvent être cotées sur une bourse de valeurs, ce qui offre aux investisseurs la possibilité de les acheter et de les vendre sur le marché secondaire, offrant ainsi une liquidité accrue.
Les investisseurs ont la possibilité d’acheter et de vendre des obligations sur le marché secondaire après leur émission initiale, leur permettant de réagir aux conditions changeantes du marché.
Les obligations génèrent généralement des paiements d’intérêts réguliers, calculés sur la base du taux d’intérêt convenu.
À l’échéance, l’emprunteur est tenu de rembourser le capital emprunté aux investisseurs.
Les fonds levés par le biais de l’émission d’obligations sont utilisés pour financer le projet d’infrastructure, y compris la construction, la maintenance, et d’autres coûts associés.
L’emprunteur doit se conformer aux réglementations et aux exigences légales du pays et des marchés où les obligations sont émises et négociées.
De plus, l’emprunteur est généralement tenu de fournir des rapports financiers réguliers aux investisseurs pour les tenir informés de la performance du projet.
L’émission d’obligations offre aux promoteurs de projets une source de financement importante, permettant une diversification des sources de fonds. Cependant, elle engendre également des coûts, des obligations de conformité réglementaire et des paiements d’intérêts réguliers qui doivent être pris en compte dans la planification financière du projet. En outre, le succès de l’émission d’obligations dépendra de la perception du risque du projet par les investisseurs et de la capacité de l’emprunteur à respecter ses engagements financiers.
En ce qui concerne l’émission d’obligations en Afrique pour le financement de projets d’infrastructures de transport, tels que les gazoducs et les chemins de fer destinés au transport de produits gaziers et miniers, elle comporte des limites et des défis spécifiques liés à la région, il convient de noter certaines limites et défis :
Tout d’abord, les marchés des capitaux en Afrique sont généralement moins développés que dans d’autres régions du monde, tels que l’Europe ou l’Amérique du Nord, limitant ainsi la disponibilité de capitaux pour les émissions obligataires, notamment pour les projets de grande envergure.
De plus, certains pays de la région présentent un risque souverain élevé en raison de facteurs tels que l’instabilité politique, les conflits régionaux et les incertitudes économiques, ce qui peut dissuader les investisseurs d’acheter des obligations émises par des entités dans ces pays.
De surcroît, les marchés en Afrique sont soumis à des fluctuations importantes des taux de change, ce qui peut affecter la stabilité financière des projets et rendre le remboursement des obligations plus difficile si la monnaie locale se déprécie par rapport à la monnaie dans laquelle les obligations ont été émises.
Les réglementations sur les marchés des capitaux varient d’un pays à l’autre dans la région, compliquant ainsi la navigation dans le processus d’émission d’obligations, notamment en ce qui concerne les exigences en matière de documentation, de conformité et de réglementation des changes.
Les marchés des capitaux jouent un rôle important dans le financement des projets d’infrastructure. Ils permettent aux gouvernements, aux entreprises et aux institutions financières d’accéder aux ressources financières nécessaires pour financer des projets à long terme et à coût élevé.
Les émetteurs d’obligations pour de tels projets doivent établir une solide réputation et crédibilité sur les marchés financiers internationaux pour attirer les investisseurs, un défi potentiel pour les nouvelles entités ou les gouvernements régionaux moins connus.
De plus, les obligations peuvent nécessiter des actifs sous-jacents ou des garanties pour assurer la sécurité des investisseurs, ce qui peut être difficile à obtenir pour les projets d’infrastructures de transport.
Enfin, la gestion des risques de change pour le remboursement des obligations en monnaie étrangère peut être coûteuse pour les projets qui génèrent des revenus dans une monnaie locale.
Il est également important de noter que les émissions obligataires sont influencées par les conditions du marché international, ce qui signifie que les changements dans les taux d’intérêt mondiaux ou les évolutions économiques peuvent avoir un impact sur la capacité à émettre et à rembourser des obligations.
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